Leïla Slimani, représentante officielle de la francophonie en France et Prix Goncourt 2016 C. Hélie © Editions Gallimard
« Marcher dans la rue. Prendre le métro le soir. Mettre une minijupe, un décolleté et de hauts talons. Danser seule au milieu de la piste. Me maquiller comme un camion volé. Prendre un taxi en étant un peu ivre. M’allonger dans l’herbe à moitié dénudée. Faire du stop. Monter dans un Noctambus. Voyager seule. Boire seule un verre en terrasse. Courir sur un chemin désert. Attendre sur un banc. Draguer un homme, changer d’avis et passer mon chemin. Me fondre dans la foule du RER. Travailler la nuit. Allaiter mon enfant en public. Réclamer une augmentation. Dans ces moments de la vie, quotidiens et banals, je réclame le droit de ne pas être importunée. Le droit de ne même pas y penser. Je revendique ma liberté à ce qu’on ne commente pas mon attitude, mes vêtements, ma démarche, la forme de mes fesses, la taille de mes seins. Je revendique mon droit à la tranquillité, à la solitude, le droit de m’avancer sans avoir peur. Je ne veux pas seulement d’une liberté intérieure. Je veux la liberté de vivre dehors, à l’air libre, dans un monde qui est aussi un peu à moi. »
Extrait de la tribune de Leïla Slimani dans Libération le 12 janvier
Sous de doux airs, Leïla Slimani cache un style mordant et un impressionnant pouvoir de perception qui lui permet d'explorer les tréfonds de la psychologie humaine. Dans Chanson douce, elle déploie une force de frappe inégalable, un sens du détail fin qui confère à son texte un réalisme marquant. Son dernier livre Sexe et mensonges, paru en septembre dernier, raconte à travers sa voix et celles de ses personnages, une société marocaine dans laquelle la sexualité est tabou, et où les femmes sont élevées dans une sacralisation de la virginité.
Date de publication: 9 mars 2018