Père et fils

Père et fils fait suite à l'exposition, présentée à la Maison Européenne de la photographie en 2015, et permet au photographe Grégoire Korganow de s'immerger dans la relation père-fils en Chine, à travers une série de portraits réalisés au cours d'une résidence.

« Qu’est-ce qu’un père ? Qu’est-ce qu’un fils ? Quel est lien qui les unit ? Le sang ? L’amour ? La transmission ? L’héritage ? Je photographie des pères, de 30 à 80 ans, debout, torse nu, avec leurs fils de quelques mois pour les plus jeunes ou entrés dans la cinquantaine pour les plus âgés. Ils sont proches, souvent peau contre peau. En regardant ces portraits, on recherche les ressemblances. On scrute les traits du visage, on compare les gestes, les attitudes. On imagine une histoire. On tente de percer le mystère de la relation. La nudité des corps jette le trouble, brouille un peu les pistes. »

-- Grégoire Korganow

Photographe engagé dans le réel, Grégoire Korganow prend le parti des opprimés, des invisibles - les mal-logés (1994), les sans-papiers (1995), les indiens Mapuche du Chili (Révoltes, 2003), les victimes irakiennes (Gueules cassées, 2010), les alcooliques (2011)… - et tente de donner à ressentir leur condition. Attiré par le hors champ, il photographie les coulisses de l’élection présidentielle de 2002, des tournages de films X (Hardcorps, 2003) ou de défilés de mode (Coulisses, de 2002 à 2008). Il enseigne en 2012 la photographie à la Faculté Paris 1 et donne régulièrement des ateliers pratiques aux Rencontres photographiques d’Arles.

 

Tony et Simon, Père et fils, 2014, France
Premier peau à peau entre Tony et son fils Simon, âgé de quelques minutes. Cette image, je l’ai faite lors d’une résidence à la maternité du CHU-Hôpitaux de Rouen. Le père est particulièrement à l’aise et trouve immédiatement les gestes pour porter son enfant. Simon est le troisième enfant de Tony. Ce jeune père de famille vit dans les quartiers populaires de Rouen. Il est sans emploi mais assure avoir ainsi le temps de s’occuper de ses enfants.

 

Andrey et Romeo, Père et fils, 2015, Brésil
Andrey a 17 ans, il vit dans une favella de Rio. Il élève seul son fils Romeo. J’ai ressenti chez ce jeune père un élan vital très fort le reliant à son enfant, qu’il protège et dont il est fier.

 

Rémi et Xavier, Père et fils, 2011, France
Rémi est agriculteur. Il accepte de faire ce portrait pour faire plaisir à son fils Xavier, qui travaille alors à la Maison de le Culture 93 de Bobigny, théâtre de banlieue de parisienne où j’avais installé mon studio. C’est la première fois que Rémi entre dans un théâtre. Il ignore probablement tout de la vie de son fils de 20 ans, étudiant aux beaux-arts de Paris. Le père parle peu, il est réservé et peu disposé à se déshabiller. Mais le fils insiste, et le père finit par accepter. Dès l’instant où il se sont tenus torse-nu côte à côte, le père a été submergé par l’émotion. Les deux hommes se sont serrés dans les bras. Je me suis éclipsé, les laissant profiter de ce moment de retrouvailles. Je suis revenu une vingtaine de minutes plus tard et la séance photo a été extraordinaire.

 

Diven et Erio, Père et fils, 2011, France
Diven est allé chercher son père, atteint de la maladie d’Alzeimer, à l’hôpital le jour de la photographie. Le père ne parlait pas français, seulement l’italien sa langue maternelle. Diven a aidé délicatement son père à se déshabiller, lui a retirer sa chemise son maillot de corps, et, geste qui m’a particulièrement touche, l’a recoiffé de sa main. Il était inquiet de savoir si son père le reconnaissait. Il lui a demandé « tu sais qui je suis ? », le père, sans hésiter, lui a répondu: « bien-sûr, tu es mon fils ».

 

 

Date de publication: 7 mai 5, 2016